"C'est devenu une désolante habitude. Cette année encore, le carnaval des gueux a dégénéré, mardi, en fin de défilé. Avec, dans les rues de l'Écusson, où régnait une ambiance électrique, des affrontements entre forces de l'ordre et une centaine de festivaliers dont une partie d'alternatifs. Bilan : huit interpellations de jeunes dont sept étaient toujours en garde à vue, hier soir. Six pour avoir lancé des bouteilles sur les CRS (un a été mis hors de cause), deux pour avoir incendié des poubelles. Et neuf policiers ont été touchés sans gravité par les projectiles. Mais aussi des bars obligés de plier boutique à minuit et des passants éberlués, contraints de rebrousser chemin et d'éviter les canettes qui volent...
Grenades de désencerclement contre bouteilles
en verre
« C'est bizarre ce carnaval à Montpellier, tout le monde pleure », s'étonne un touriste, refoulé de la place de la préfecture vers minuit, par la centaine de policiers en tenue ou en civil déployés qui ont répondu à coups de tonfa et de grenades de désencerclement aux jets de bouteille.
À qui la faute ? Chacun se renvoie la responsabilité. En fait, jusqu'à 22 h 30, le carnaval s'est déroulé dans la bonne humeur, 400 personnes défilant et dansant aux sons des batucadas antillaises. Et puis, au moment de brûler Carnaval, comme le veut la tradition, tout a dégénéré à proximité de la préfecture, puis place Saint-Anne.
'La matraque pour la journée de la femme...'
Delphine, carnavalière « Il ne se passait rien de spécial, il y avait un feu de chariot, on brûlait Carnaval et, tout d'un coup, les CRS ont décidé de charger pour disperser la foule, raconte, choqué, Christophe, photographe de studio, croisé place Saint-Anne. Moi, je ne prends pas parti mais quand je les ai vus matraquer quelqu'un, j'ai voulu faire une photo. J'ai rien provoqué, j'ai pas bu une goutte et j'ai pris des coups. Je me demande où on est, ici... Mais on me dit que c'est toujours comme ça. »
Même son de cloche chez Delphine, furieuse. « Hormis quelques anarchistes qui ont lancé des bouteilles, personne n'était dans la provocation. On voulait juste passer un moment joyeux, on s'est fait virer avec des insultes et j'ai pris un coup de matraque sur le crâne. C'est bien pour la journée de la femme... »
Effectivement, nous avons constaté que les forces de l'ordre n'ont pas donné dans la dentelle. « Ils ont fait un important feu, dangereux et qui bloquait la rue Foch. On a dû intervenir pour que les pompiers puissent l'éteindre », justifie Marcel Authier, le directeur départemental de la sécurité publique. Qui explique que les policiers ont alors été visés par des projectiles, y compris jetés de fenêtres, ce que nous avons aussi constaté... Et que certains individus, bien ivres, étaient là pour 'casser du flic', comme l'invitaient certaines affiches annonçant le carnaval, collées en ville ces derniers jours.
« Ce sont des bouteilles en verre, il y en a partout par terre, c'est particulièrement dangereux », rappelle Pierre Maitrot, le directeur de cabinet du préfet. Les gueux ont été refoulés de Sainte-Anne, puis du Jeu-de-Paume vers le plan Cabanes, où tout s'est calmé vers 1 h 30, sans dommage corporel trop grave. Cette fois-ci."
Midi Libre.