vendredi 27 août 2010

Toronto (Canada) : 303 accusés dans le box pour les affrontements du G20 de juin

"Comparutions massives à Toronto

Radio Canada, mardi 24 août 2010 à 4 h 50

(Toronto) Les comparutions des 303 personnes, dont une centaine de Québécois, accusées dans la foulée du sommet du G20, en juin dernier, se sont amorcées lundi devant un tribunal de Toronto.

Tous étaient appelés à comparaître le même jour, mais le tribunal a renvoyé plusieurs des accusés chez eux, certains des dossiers de preuves n’étant pas prêts. L’audition de leur cause a été reportée à l’automne.

Plusieurs des Québécois arrêtés le 27 juin dans un gymnase de l’Université de Toronto où ils dormaient devront revenir en cour le 14 octobre. Plusieurs d’entre eux disaient avoir l’impression d’avoir fait le voyage à Toronto pour rien.

Accusé de complot en vue de se livrer à des voies de fait, d’obstruction aux forces de l’ordre et de voies de fait contre des policiers, le Montréalais Jaggi Singh devra de son côté se représenter en cours à la fin du mois de septembre.

Son avocat, Peter Rosenthal, a également demandé une révision des conditions de libérations conditionnelles de son client. Il affirme que l’interdiction imposée à son client de participer à toute manifestation limite sa capacité de travailler en tant qu’organisateur communautaire à Montréal

Le procureur a par ailleurs demandé à certains accusés de s’engager à ne pas troubler l’ordre public pour un an. D’autres cas se sont réglés grâce aux programmes de déjudiciarisation, qui permettent de faire des travaux communautaires ou des dons de charité plutôt que de passer par le processus judiciaire. Ces processus ne nécessitent pas un aveu de culpabilité.

Dans certains cas, la Couronne a tout bonnement décidé de ne pas aller de l’avant avec les poursuites judiciaires. Les deux photographes du National Post accusés d’entrave au travail d’un policier et de regroupement illégal, font partie de ceux qui ont vu les accusations déposées contre eux retirées.

Certains ont affirmé que des dizaines de poursuites avaient été abandonnées, mais un porte-parole du Bureau du procureur général a indiqué que ces données ne seraient pas disponibles avant mardi.

Le « chaos », dit l’un des avocats de la défense

Trois salles d’audience avaient été réservées pour accueillir les accusés, qui ont défilé jusqu’à 15 h. Il s’agissait d’une des comparutions de masse les plus importantes de l’histoire de Toronto. Les couloirs du tribunal ne peuvent accueillir que 176 personnes, et certains des accusés n’ont pu pénétrer dans la salle où leur audience était prévue que lorsque leur cause était sur le point d’être entendue.

Me Rosenthal a déploré le « chaos » que ces très nombreuses comparutions avaient engendré. Le Bureau du procureur général a affirmé qu’il était plus simple de traiter tous les dossier le même jour.

Le procureur de la Couronne, Vincent Paris, a précisé que la plupart des accusés comparaissaient pour la première fois, mis à part leur audience sur la libération sous caution. Certains accusés, toujours détenus, ont comparu par vidéo, et d’autres en personne. Certains étaient accompagnés de leur famille, de leurs amis et de leurs avocats.

Les accusations vont de trouble de la paix à complot pour agression, en passant par entrave au travail des policiers.

Plusieurs des accusés qui comparaissaient lundi affirment n’avoir rien à se reprocher et qualifient d’injustifiées les accusations qui pèsent contre eux.

Les autorités ont indiqué que la majorité des prévenus défilant au tribunal avaient été arrêtés le 26 juin, lors d’une manifestation parc Queen’s Park North, près du parlement ontarien. Ce parc avait été désigné comme étant la zone de manifestation officielle par les autorités.

Manifestation en marge des comparutions

À l’extérieur du tribunal, des manifestants ont appelé à l’abandon de toutes les accusations.

Lors d’une conférence de presse organisée en matinée devant le palais de justice, le Réseau de mobilisation communautaire de Toronto a accusé la police d’avoir effectué des arrestations arbitraires durant le G20.

« Nous insistons sur le fait que les procédures pénales en cours sont coûteuses, inutiles et imparfaites et nous demandons l’abandon immédiat des accusations », a déclaré la militante Jessica Denyer.

Nous assistons à la criminalisation de la dissidence. Les vrais crimes ont été commis à l’intérieur des barrières.
- Maryam Adrangi, porte-parole du Réseau de mobilisation communautaire de Toronto

Un groupe de militants a par ailleurs organisé une collecte de fonds pour aider les accusés à payer leurs frais juridiques.

Une intervention critiquée

L’intervention des forces de l’ordre durant le sommet a fait l’objet de vives critiques. Les tribunaux auront à traiter d’autres affaires en lien avec le G20.

Sherry Good, une femme qui affirme avoir été arrêtée et détenue lors du sommet du G20, a notamment intenté un recours collectif de 45 millions de dollars contre la police de Toronto et le procureur général du Canada, au nom de 800 personnes qui, comme elle, affirment avoir été interpellées sans motif valable lors de l’événement.

Le premier ministre de l’Ontario, Dalton McGuinty, a fait un mea culpa et a reconnu que son gouvernement aurait dû clarifier plus rapidement les informations sur les pouvoirs accordés aux policiers lors du sommet. Plusieurs organismes et partis politiques ont réclamé une enquête publique sur le travail des policiers.

Du côté des commerçants victimes de vandalisme, le gouvernement fédéral a récemment annoncé qu’il élargissait la portée de son programme de compensation à ceux qui se trouvaient à l’extérieur du périmètre de sécurité.

Au moins cinq voitures de police ont été incendiées, et des vitrines, fracassées, lors des manifestations de juin dernier au centre-ville de Toronto. Il y a eu plus de 1000 arrestations."

http://cettesemaine.free.fr/spip/article.php3?id_article=3409