A l'heure où le procès en appel des accusés de Villiers le Bel va avoir lieu, un petit revival d'un ou deux tracts de l'été dernier.
À LA FIN D’APRÈS-MIDI DU 25 NOVEMBRE 2007, Lakhamy et Moushin - deux adolescents - se font shooter par une voiture de la police. Un meurtre de plus. Deux nuits d’émeutes.
Sur les lieux, le commissaire fraîchement arrivé, se fait lyncher. Destructions des bâtiments institutionnels, affrontements directs contre la police, tirs à la chevrotine, barricades, guet-apens tendu contre les flics, attaque et incendie du commissariat... Du 25 au 27 novembre, Villiers-le-bel se soulève et ne se résigne pas.
CES MOMENTS D’AFFRONTEMENTS ET D’ÉMEUTES NE SONT PAS ISOLÉS. En octobre 2007, à Saint-Dizier, flics et pompiers sont caillassés, puis la MJC incendiée. 8 personnes passent en procès actuellement, avec des réquisitions reposant sur des témoignages sous X. A plusieurs reprises, depuis 2005, à Grigny les flics se sont fait tirer dessus à la chevrotine. En novembre 2005, la révolte s ?était étendue un peu partout. Depuis rien n’a changé.
À partir du 21 juin a lieu le procès de 4 personnes inculpées d’avoir tiré à la chevrotine sur les flics durant les émeutes. On sait bien, il suffit de l’avoir expérimenté ou d’y être confronté une fois, ce qu’est un tribunal. Mise en scène bien huilée, quelques chacals habillés en noir jonglent avec les peines et la vie de celles et ceux qui sont du mauvais côté de la barre. C’est pas une mesure exceptionnelle du type accordée une clémence ou faire sauter un haut responsable, qui changeront quelque chose. La Justice est nécessairement du côté de l’État et des plus riches. Pour le procès des émeutiers de Saint-Dizier, le procureur a déclaré que « rien ne justifie ce comportement antisocial de ces quelques barbares aigris et paresseux ».
Nous n’attendons plus rien de l ?État, de sa Justice et de ses institutions.
LES PERQUISITIONS ET ARRESTATIONS DU 18 FÉVRIER 2008, ont été surtout une démonstration de force et un acte de communication du gouvernement. Les journalistes présents ne couvraient pas un évènement, ils en faisaient partie. À partir de là chacun va essayer de tirer les marrons du feu. L’État réaffirme son monopole de la violence. La Justice devra suivre, entérinant cette réalité, en assenant de lourdes peines.
Le PS a joué sa carte en prenant un « grand frère » sur ses listes électorales. L’ambitieuse Sylvie Noachovitch, avocate d’un des inculpés et élue UMP, s’est mise sur les rangs. On peut imaginer que Villiers-le-bel en a vu passer quelques-uns, de tous les bords politiques. De Luc Besson aux derniers gauchistes... Pas sûr que tous ces rackets politiques profitent aux inculpés...
LES HÉLICOPTÈRES, LES SNIPERS (DU RAID), les menaces réitérées d’envoyer l’armée, le couvre-feu en 2005, Vigipirate et ses militaires dans les gares... On a pu l’observer depuis une paire de décennies, le rôle et les moyens de la police et de l’armée tendent sinon à fusionner, au moins à s’entremêler. Au Kosovo, l’essentiel de la mission de l’armée française a été le maintien de l’ordre. Symptomatique d’une époque où l’État n’a plus rien à proposer. Sinon le maintien du statu quo.
LORSQUE LA RÉVOLTE ÉCLATE, l’évènement qui la déclenche est souvent la goutte d ?eau qui fait déborder le vase. Autrement dit, pour qu’une étincelle mette le feu à la plaine, il faut que la plaine soit prête à flamber.
Bien sûr, la seule présence policière peut être une raison suffisante pour avoir les nerfs. Au-delà de ça, ces émeutes sont aussi une preuve de lucidité. À savoir que l’on a bien compris qu’ici nous n’avons et nous n’aurons que la survie. Que cette survie a le goût de la soumission, de l’ennui et de la fatigue.
Que l’État et les politiciens n ?ont rien d ?autre à proposer. Que ces politiciens bataillent en communication en vue d ?élection, mais ont de toute façon sensiblement la même gestion une fois arrivés aux affaires. Que notre situation de survie est nécessaire au capitalisme et à son développement.
Le plan d’austérité en Grèce et de rigueur ici en est la dernière illustration.
Que face à la police dans la rue, face à une assistante sociale dans son bureau, face à un patron sur le marché du travail : nous sommes toujours le dindon de la farce. À nous d’inverser ce rapport.
Le procès des inculpés de villiers-le-bel débute le 21 juin au tribunal de pontoise
Solidarité !
Guerre et Paix
A propos des émeutes de Villiers-le-Bel
« Il faut bien que la vérité monte des bouges, puisque d’en haut ne viennent que des mensonges. »
Louise Michel, 1890.
25 novembre 2007, Villiers-le-Bel. Deux gamins sont tués par les flics, s’ensuivent plusieurs nuits d’émeutes durant lesquelles des dizaines et des dizaines de keufs sont attaqués directement et blessés, certains gravement. L’honneur de la police nationale est touché en plein cœur, mais leur déshonneur participe à notre bonheur. Trois mois plus tard, 1500 flics et journaflics débarquent sur place, bouclent la ville et arrêtent une trentaine de personnes sur la base de dénonciations anonymes et rémunérées par les keufs. Beaucoup payeront pour les désordres avec des peines de plusieurs années de prison ferme. Le 21 juin prochain, les quatre derniers inculpés passeront aux assises, accusés d’avoir tiré sur les flics. Ils croupissent déjà en taule depuis deux ans.
Nul besoin de faire appel à madame soleil pour savoir qu’ils sont condamnés d’avance par cette justice de classe pour laquelle désordre et révolte sont des crimes impardonnables. A travers elle, c’est toute la démocratie qui se venge des indésirables qu’elle ne parvient pas à gérer.
Une chose est sûre : il est simple, d’après ces quelques données, de choisir son camp avec clarté. Nous prenons le parti de la révolte, car nous n’attendons rien des institutions : ni le respect, ni la vérité, ni la justice.
Clairement, ces quelques nuits d’émeutes ont fissuré la paix sociale, comme en novembre 2005 ou en Grèce, c’est toute la colère et la frustration rentrées du quotidien qui explose au grand jour, c’est des bagnoles de flics qui crament, des flics pris pour cible à la chevrotine et au Molotov, des bâtiments officiels incendiés.
Où que nous soyons, laissons nous aussi éclater notre rage et prenons notre courage à deux mains, car ce qui nous détruit est partout, nos ennemis sont à notre portée. Cette paix sociale qui ne peut être imposée que par la violence de l’Etat est aussi forgée de notre propre résignation et de nos regards baissés face à l’arrogance de la canaille, celle des condés, juges, grands frères, pédagogues, petits chefs et directeurs de conscience en tout genre.
Le jeu en vaut la chandelle.
Ni justice, ni paix.
Que crèvent les balances, que la guerre sociale l’emporte.
[Tract trouvé dans les rues de Paris, Juin 2010.]
http://non-fides.fr/?Guerre-et-Paix
Liberté !