mardi 22 décembre 2009

Piazza Fontana : révisionnismes d’Etat et révisionnistes du mouvement

Quarante ans se sont écoulés depuis le massacre de Piazza Fontana. Et cette année encore se sont tenus rituels hypocrites et autres commémorations : défilés de citoyens parsemés d’étendards municipaux et étouffés par des pléthores de représentants des institutions. Le massacre d’État commémoré, avec les larmes aux yeux, par l’État lui-même et par ses fidèles laquais.
Mais cette année, nous n’avons pas seulement eu droit aux commémorations, (ravivées par ailleurs par la lutte à Milan), mais également au révisionnisme. Début décembre les agences de presse répandent la nouvelle selon laquelle le Parquet de Milan se préparerait à ouvrir une nouvelle enquête sur l’explosion à la Banque de l’Agriculture en décembre 1969. En prenant appuis sur un livre écrit par un journaliste de l’Ansa, en l’occurrence Paolo Cucchiarelli, on serait en train de suivre une piste vraiment singulière : ce jour-là, deux bombes auraient en fait explosé, une posée par les fascistes (mortelle), et l’autre par des anarchistes (qui n’aurait blessé personne). Une histoire fantastique, capable au final de mettre sur un même plan les « extrémistes opposés » sur lesquels tant d’encre a été versé. Est-ce que vous imaginez Delfo Zorzi et Pietro Valpreda, l’immonde fasciste et l´anarchiste naïf, arriver chacun de son côté, avec son engin explosif ? Pourtant il y a des gens pour croire à ces conneries, ou du moins, pour leur prêter une certaine crédibilité.

Des ordures d’État, se dira-t-on, sur lesquels cracher sans perdre trop de temps. C’est vrai. Mais malheureusement l’État n’est pas l’unique producteur de ce genre de pourriture. Radiocane a également pensé rappeler ce lointain 12 décembre en accueillant à son micro Oreste Scalzone, qui s’est laissé aller à un long verbiage présenté par lui-même comme « une réflexion, dirons-nous… "difficile" et exposée avec la conscience qui, au-delà du scandale, peut engendrer perplexité et souffrance "parmi" nous. » Laissons pourtant de côté cette sulfureuse annonce auto-promotionnelle. Étant donné le personnage, nous ne trouvons pas ses mots vraiment scandaleux, ils ne nous laissent ni perplexes ni ne nous font souffrir outre mesure. Ils nous dégoûtent simplement par la mauvaise foi si vulgaire qui les anime.

Il suffit de l’écouter pour comprendre que l´objet de ses « réflexions » sont, plus que les anarchistes, les militants de Lotta Continua. L´ex-leader de Potere Operaio a peut-être quelques vieilles rancœurs avec ses anciens rivaux, et il en profite pour attaquer à tout va leurs "balivernes" sur cette période. Il va de soi que les règlements de comptes posthumes entre cogneurs de factions politiques concurrentes nous laissent proprement indifférents. Pour nous ce serait un plaisir de laisser les morts enterrer leurs morts. Mais ce faisant le zombie Scalzone a eu l’idée malsaine de s’en prendre aux anarchistes, à l’histoire du mouvement anarchiste et au sens même de l´anarchisme (alors qu’il démontre qu’il n’en possède pas une connaissance dépassant les vers de quelques chansonnettes). Et sur cela, qu’il nous soit permis de dire notre façon de penser.

http://nantes.indymedia.org/article/19127

Traduit de Guerra Sociale